
Contexte. Philippe Latombe, député français, a introduit un recours en annulation de l'accord de transfert de données entre l'UE et les États-Unis (cadre transatlantique de protection des données) devant le Tribunal (première instance des juridictions de l'UE). La CJUE (deuxième instance au sein des juridictions de l'UE) avait précédemment statué, dans les affaires "Schrems I" et "Schrems II", que les deux accords précédents étaient illégaux. Ces deux décisions ont été annulées. Le nouvel accord est structuré de manière presque identique aux anciens accords illégaux et est donc probablement illégal - en particulier si l'on considère les derniers abus de pouvoir de l'administration Trump en matière d'émission de décrets. Étant donné que l'affaire de Latombe a été introduite en tant que recours en annulation et non en tant que question préjudicielle par une juridiction nationale, il devait non seulement prouver que l'accord était erroné sur le fond, mais aussi qu'il était directement affecté afin d'avoir le droit d'introduire un recours.
Le défi de Latombe n'est pas convaincant pour le Tribunal. L'équipe de M. Latombe a opté pour une contestation plutôt ciblée et étroite de l'accord UE-États-Unis sur les données. Il semble que, dans l'ensemble, le Tribunal n'ait pas été convaincu par les arguments et les points soulevés par M. Latombe. Toutefois, cela ne signifie pas qu'un autre recours portant sur un ensemble plus large d'arguments et de problèmes liés à l'accord ne serait pas couronné de succès. M. Latombe peut également choisir de faire appel de la décision auprès de la CJUE, qui (à en juger par les décisions précédentes dans les affaires "Schrems I" et "Schrems II") pourrait avoir une opinion différente de celle du Tribunal.
Max Schrems : "Il s'agissait d'une contestation plutôt limitée. Nous sommes convaincus qu'un examen plus large du droit américain - en particulier l'utilisation de décrets par l'administration Trump - devrait aboutir à un résultat différent. Nous examinons nos options pour introduire un tel recours. Si la Commission a peut-être gagné une année supplémentaire, nous n'avons toujours pas de certitude juridique pour les utilisateurs et les entreprises."
La décision sur le RGPD s'écarte des faits aux États-Unis. Le premier communiqué de presse de la Cour résume l'affaire, mais il semble que le Tribunal se soit considérablement écarté de l'arrêt de la CJUE et qu'il n'ait pas non plus tenu compte de la législation américaine. La Cour a par exemple estimé que la nouvelle "Cour de contrôle de la protection des données" (CCPD) serait indépendante, alors que cette indépendance n'est garantie que par un décret présidentiel et non par la loi. Aujourd'hui, Trump révoque des personnes alors que leur indépendance est garantie par la loi.
Max Schrems :"Nous voyons actuellement Trump destituer des responsables 'indépendants' de la FTC ou de la Réserve fédérale. La Cour en question n'est même pas établie par la loi, mais seulement par un ordre exécutif du président - et peut donc être révoquée dans la foulée. Il est très surprenant que la Cour de justice de l'Union européenne ait jugé cela suffisant. Si l'on compare cette affaire avec des affaires internes à l'UE telles que celles concernant la Pologne ou la Hongrie, il faut faire preuve d'une grande souplesse mentale pour accepter qu'il s'agisse d'une Cour indépendante
Le Tribunal s'écarte massivement des décisions de la CJUE. Les protections prévues par le nouvel accord sont presque un copier/coller à l'identique des accords précédents que la CJUE a jugés illégaux dans les affaires Schrems I et Schrems II. À certains égards, les protections sont même pires que celles prévues par l'ancien décret, qui n'étaient pas suffisantes pour la CJUE. Il est donc surprenant que le Tribunal rende une décision différente sur la troisième version de l'accord UE-États-Unis par rapport aux deux versions précédentes.
Max Schrems :"Il est clair que la juridiction inférieure s'écarte massivement de la jurisprudence de la CJUE. Nous sommes très surpris de ce résultat. Il se peut que le Tribunal n'ait pas disposé de suffisamment d'éléments de preuve ou qu'il ait voulu s'écarter de la CJUE. Nous devrons analyser l'arrêt plus en détail dans les prochains jours